La Baule+

la baule+ Octobre 2022 // 15 aimait éperdument les femmes, est-ce pour cela aussi qu’il ne les touchait pas ? Il y a des hommes gays, comme moi d’ailleurs, qui finalement aiment peut-être mieux, ou d’une meilleure manière, les femmes, que lorsque naturellement on a une attirance sexuelle. Mais aujourd’hui, je pense que les hommes et les femmes naviguent beaucoup plus librement dans leur sexualité et la bisexualité et, peut-être, une réponse de paix. Vous commencez votre livre en évoquant la dépénalisation de l’homosexualité, en 1981, une date très importante pour vous… C’est lors d’une conversation récente avec Élisabeth Badinter et Robert Badinter, que j’ai réalisé que je faisais partie de ces jeunes garçons ou filles qui vivaient horsla-loi sans se rendre compte qu’ils étaient hors-la-loi, puisque nous vivions discrètement. Il a fallu l’élection de François Mitterrand en 1981, la loi Badinter en 1982, pour que l’homosexualité soit dépénalisée et que cela devienne une sexualité banale, comme une autre. Maintenant, cela ne signifie pas qu’il y avait des répressions contre les homosexuels sous Valéry Giscard d’Estaing… Oui, mais on pouvait être arrêté, c’est arrivé. Il y avait des gens qui vivaient leur vie, mais c’était hors-la-loi. Je suis d’une génération qui a participé à ce que nous soyons comme tout le monde, car, comme le disent mes fils, l’homosexualité est un non-sujet et l’on aimerait que ce le soit, mais dans le respect de chacune et de chacun. Quel était votre rôle auprès d’Yves SaintLaurent et de Pierre Bergé ? Je suis entré dans cette maison après avoir fait un stage lorsque j’étais étudiant à Tokyo. J’avais trouvé un petit boulot de vendeur dans une boutique d’Yves Saint-Laurent et, en même temps, je faisais le mannequin. J’étais traducteur aussi, puis j’ai été recruté comme inspecteur commercial parce que Pierre Bergé voulait que la marque SaintLaurent, qui était devenue une marque mondiale, soit contrôlée et que les excès éventuels des partenaires que nous avions soient regardés de près. Très vite, je suis devenu secrétaire général, parce que Pierre Bergé a eu le génie de faire entrer Yves Saint-Laurent dans l’histoire en le faisant entrer dans les grands musées du monde. Il y a donc eu la première exposition d’un couturier vivant au Metropolitan Museum de New York en 1983 : c’est la photo de couverture du livre. Mon rôle était de veiller à l’harmonie entre les studios de création et je devais aussi être le chef de cabinet de Pierre Bergé, en étant son relais auprès des personnalités, les institutions publiques, la chambre syndicale de la haute couture, le musée de la mode… Il y avait aussi toute la question de la contrefaçon… Il y avait une direction juridique. Nous étions très impliqués dans le domaine des contrefaçons, mais mon rôle n’était pas financier, je n’avais rien à voir avec la finance. J’étais lié avec les studios de création, avec les services de presse, donc l’image du groupe et les projets. J’ai l’image d’un tandem très particulier: Yves Saint-Laurent s’occupait de la création, sans même savoir ce qu’il y avait sur les comptes en banque, alors que Pierre Bergé était vraiment le businessman et l’homme des relations institutionnelles… (Suite page 16)

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