La Baule+

la baule+ 28 // Décembre 2022 Les hauts dirigeants et les cadres supérieurs, certains payés jusqu’à 250 000 € par an, devaient réserver eux-mêmes leurs billets de train ou commander leurs taxis, et ces gens passaient des heures à faire leurs notes de frais. Lorsque les entreprises se sont mises à faire du contrôle de gestion, elles se sont aperçues que si quelqu’un qui gagne 200 000 € par an passe une dizaine d’heures par mois à gérer cette intendance, cela coûtait énormément d’argent. On s’est alors rendu compte que ces assistantes faisaient un travail important et que cela coûtait moins cher de payer quelqu’un 30 000 € par an pour faire cela toute l’année, plutôt que de payer certaines personnes 250 000 € en leur demandant de réserver leurs taxis ou leurs trains… Maintenant, on crée des centres de services partagés pour réduire les coûts, cela signifie mutualiser les fonctions support, et nous devons auditer ces centres qui portent en eux l’insatisfaction de leurs clients internes et la toxicité de leur organisation. En ce moment, j’ai un client qui est systématiquement en retard dans sa facturation, or la DRH m’explique que le service facturation est en Pologne et qu’ils n’arrivent pas à les joindre. Ou, quand vous êtes une usine à côté de Lyon qui doit recruter un ingénieur qualité, vous devez vous adresser à un centre de services à Londres pour faire une annonce ! On avait des stéréotypes sur nos entreprises publiques et l’on a bureaucratisé les entreprises privées. Résultat, les salariés font ce qu’ils peuvent, en travaillant le soir et le week-end, et ils s’épuisent. Certaines entreprises lucides ont compris que l’open space était une foutaise, mais on avait toutes les données scientifiques depuis très longtemps. Rien ne sécurise plus les gens que de faire la même chose que ce qui se passe à côté Comment se fait-il que des grands patrons, qui ont fait de longues études, puissent commettre de telles erreurs ? Parce que nous sommes tous sensibles à la norme. C’est un mythe que de s’imaginer que le capitaine d’industrie est quelqu’un de visionnaire insensible à tout ce qui se passe autour de lui. Rien ne sécurise plus les gens que de faire la même chose que ce qui se passe à côté. Il suffit qu’une nouvelle mode managériale pointe son nez, pour que ces grands patrons qui n’ont jamais été formés aux sciences humaines - ce qui est problématique - soient tentés de l’imiter. Je vous rappelle que dans les cursus des grandes écoles de commerce en France, il n’y a pas de formation en sciences humaines, ne serait-ce que sur le fonctionnement de la motivation. On sait depuis trente ans quels sont les déterminants de la motivation en situation de travail, mais on nous parle encore de la pyramide de Maslow ou des tests de personnalité qui ont le même pouvoir prédictif que l’horoscope... La bonne nouvelle, c’est que je vois une nouvelle génération de DRH qui est très intéressée par ces sujets, ni par gentillesse, ni par mièvrerie, donc c’est en train de changer. Réseaux sociaux: ces outils sont aujourd’hui extrêmement dépressogènes, puisque l’on vous vend quelque chose qui n’existe pas Enfin, vous évoquez l’usage abusif des réseaux sociaux, qui a un impact sur notre santé mentale… C’est un sujet de société, autant pour le travail que pour la parentalité, car des études mettent en lumière la dimension causale qu’il y a entre l’exposition aux écrans et les difficultés de concentration. J’insiste sur cette dimension de causalité et on peut affirmer aujourd’hui que la quantité de temps que l’on passe sur Instagram ou Facebook est directement liée à la quantité d’affect dépressif que l’on peut éprouver. On vit dans une société où l’attention a énormément de valeur et c’est pour cette raison que ces sites sont bien valorisés. Ils ont vocation à capter votre attention de manière continue. Ils modifient les algorithmes pour que vous naviguiez sans cesse sans vous déconnecter. Ces outils sont aujourd’hui extrêmement dépressogènes, puisque l’on vous vend quelque chose qui n’existe pas et l’on vous montre des vies dont on a choisi de ne sélectionner que la partie positive et reluisante. Donc, le spectateur se demande comment les gens font pour être heureux constamment. Si vous vous représentez le bonheur comme un état de grâce permanent et continu, alors vous allez au-devant de grandes déconvenues ! On ne peut pas attendre du bonheur un état de grâce permanent et continu, cela s’appelle l’euphorie, et, à part chez celles et ceux qui sont constamment en train de prendre des drogues dures, je ne pense pas que cela existe beaucoup et je n’envie pas la santé physique et mentale de ces gens... Puisqu’il n’est pas possible d’être dans une euphorie constante, on doit modifier notre représentation du bonheur et on peut se promettre une vie riche et pleine de sens. Les réseaux sociaux sont donc davantage pourvoyeurs d’éléments dépressogènes que de satisfactions. Sur les outils numériques, c’est comme un couteau, ce n’est ni bon ni mauvais : c’est l’usage qui fait la différence. On est en train d’apprendre à doser avec modération le travail à distance et les premières études sont intéressantes, car les outils numériques génèrent une fatigue cognitive considérable, mais ils peuvent aussi être incroyablement efficaces pour éviter des temps de trajet trop important. Là encore, le poison est dans la dose. Tout est question de modération et nous sommes en train de la trouver. Propos recueillis par Yannick Urrien. Adrien Chignard : « Certaines entreprises lucides ont compris que l’open space était une foutaise, mais on avait toutes les données scientifiques depuis très longtemps. » • MOTS CROISÉS • N°132 • 2 3 4 5 6 7 8 9 I VI V IV III II IX VIII VII HORIZONTALEMENT I. A l’amande, c’est une bonne pâte, à l’amende, c’est un escroc. II. Penseur patenté. III. Sur la rose. Elle passe pour être vulgaire. IV. Paroles et musique. V. Se prend pour un autre. Fière lady. VI. Article. Personnel. Fume, c’est du belge ! VII. Sorti de l’eau, sorti du lot. VIII. De l’autre côté du miroir. Bout de bois. IX. Excitants. VERTICALEMENT 1. Retenue sur les revenus. 2. Rêvée. Gaz rare. 3. Issu. Négation. Brésilienne sur la côte. 4. Maturation. 5. Pas de quartier. A quatre pattes, ils sont aussi bêtes qu’à deux. 6. Un chrétien chez les musulmans. Poulet aux hormones. 7. Trou profond. Mis sous presse. 8. Grugea. Chargée comme une mule. 9. Remises sur le marché. SOLUTIONS DU N°132 1 www.fortissimots.com HORIZONTALEMENT I. A l’amande, c’est une bonne pâte, à l’amende, c’est un escroc. II. Penseur patenté. III. Sur la rose. Elle passe pour être vulgaire. IV. Paroles et musique. V. Se prend pour un autre. Fière lady. VI. Article. Personnel. Fume, c’est du belge ! VII. Sorti de l’eau, sorti du lot. V II. De l’autre côté du miroir. Bout de bois. IX. Excitants. VERTICALEMENT 1. Retenue sur les revenus. 2. Rêvée. Gaz rare. 3. Issu. Négation. Brésilienne sur la côte. 4. Maturation. 5. Pas de quartier. A quatre pattes, ils sont aussi bêtes qu’à deux. 6. Un chrétien chez les musulmans. P ulet aux hormones. 7. Trou profond. Mis sous presse. 8. Grugea. Chargée comme une mule. 9. Remises sur le marché. Mots croisés Solutions page 34

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