La Baule+

la baule + Juillet 2021 // 29 ouvrir ce débat, parce que ce n’est pas le débat de l’éco- nomie collaborative, mais j’ai envie de répondre que Google ou Apple sont dans la légalité en jouant avec les règles du jeu. C’est peut-être à l’Europe qu’il incombe de s’harmoniser fiscalement en ayant des règles communes. Si cela ne plaît pas aux États, que les États harmonisent la fiscalité européenne. En ce qui concerne l’économie collaborative, est-ce que cela ne contribue pas à générer du travail dissimulé ou de la concurrence déloyale ? C’est un vrai débat. Je pense que sur nos modèles, comme ce- lui d’AlloVoisins, il y a tout un tas d’activités qui sont générées par nos membres qui, de toutes façons, n’in- téressent pas les entre- prises. Lorsque je cherche quelqu’un qui va venir nour- rir le poisson rouge le week- end où je suis absent, il n’y a pas une entreprise qui se dé- placerait pour cela. Et quand j’ai besoin de quelqu’un pour venir installer une tringle à rideaux sur un mur, il n’y a pas une entreprise qui se dé- placerait pour cela.... Nous couvrons de nombreuses ac- tivités qui n’intéressent pas les entreprises. Pour autant, nous sommes présents. Cela permet aux gens d’arrondir leurs fins de mois, cela per- met aux gens de nouer des contacts entre eux, et c’est du micropaiement avec des petites sommes qui sont dépensées immédiatement dans les commerces locaux. Sur le travail dissimulé, il faut bien savoir que ce type de prestation a toujours exis- té. Chaque semaine, il y a en France des vide-greniers qui ne sont pas fiscalisés. Et le baby-sitting existe depuis des décennies… Donc, ac- compagnons ce mouvement qui va se développer de gré ou de force. J’ai une propo- sition assez forte en préconi- sant que chaque citoyen ait un numéro de Siret attribué automatiquement dès l’âge de 18 ans, de la même façon que nous avons un numéro de Sécurité sociale qui nous est affecté. Et, à partir de là, n’importe quel citoyen sera en mesure d’émettre des factures. Tout cela encoura- gera l’entrepreneuriat et la prise d’initiative de manière totalement vertueuse. Par ailleurs, j’estime que nous avons une fiscalité de l’éco- nomie collaborative qui est totalement illisible : si vous vendez votre perceuse sur Le Bon Coin, vous ne serez pas fiscalisé ; mais si vous louez la même perceuse sur une plate-forme, vous serez fis- calisé... Il y a de nombreuses règles qui sont totalement absurdes et incompréhen- sibles pour les Français. Je dis qu’il faut simplifier les choses en établissant une franchise fiscale à hauteur de 3000 € par an et par ha- bitant, cela existe déjà en Belgique et, ensuite, on fisca- lise l’ensemble des pratiques collaboratives. Ce sera lisible pour tout le monde. Nous sommes dans une période vertigineuse, très exaltante. C’est un changement d’ère civilisationnel qui est compa- rable à la bascule du Moyen Âge à la Renaissance. Et tout va être chamboulé. Cette nouvelle ère qui s’ouvre, on sait qu’elle va durer a prio- ri autour de cinq cents ans. Mais personne ne sait ce qu’il va y avoir dedans et tous ces modèles qui se créent contri- buent à inventer le monde de demain. Propos recueillis par Yannick Urrien.

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